Historique du Prix Bertrand du Breuil : Sur les rails du mile

16 mai 2020

Historique du Prix Bertrand du Breuil : Sur les rails du mile

Photo scoopdyga.com

Juin, Chantilly

Prix Bertrand du Breuil Longines


(ex-Prix du Chemin de Fer du Nord)

Groupe 3, 4ans et au-dessus, 1 600 mètres, 56 000 €

Créé en 1852 (dans sa forme actuelle depuis 1933)

Tenant du titre : Pretreville (m5, FRA par Acclamation et Pegase Hurry, par Fusaichi Pegasus), appartenant à Gérard Augustin-Normand, élevé par Serge Boucheron, entraîné par Pascal Bary, monté par Cristian Demuro.

Temps record : 1'34''50 par Pretrevill en 2020.

La course se déroulera dans sa forme actuelle pour la 87ème fois en 2021


L'édition 2020

Lundi 18 mai 2020, Chantilly. – Après avoir fait le forcing au début pour prendre la tête et la corde, Pretreville (Acclamation) a dominé sûrement le prix Bertrand du Breuil Longines (Gr3), première étape d’une filière réorganisée pour mener au prix d'Ispahan (Gr1), qui se déroule cette année le 19 juillet à Chantilly et sera exceptionnellement ouvert aux 3 ans.

Le représentant de Gérard Augustin-Normand, élevé par Serge Boucheron, débutait sous l’entraînement de Pascal Bary et il a laissé à trois longueurs et demie un autre cheval qui débutait pour un nouvel entraîneur, Plumatic (Dubawi), désormais sous la responsabilité de Francis-Henri Graffard. Rapproché progressivement en dehors, il a devancé le favori Skalleti (Kendargent), bon finisseur. Les trois premiers n’avaient pas couru depuis 238, 205 et 197 jours…

Pretreville, un mâle de 5 ans, n’avait pas couru depuis sa victoire dans le prix du Point du Jour – Haras de Bouquetot (L) à Craon en septembre. Généralement allant, il était déjà monté sur le podium à chacune de ses sorties (cinq victoires et une deuxième place pour six sorties en 2019) mais il débutait dans cette catégorie.

Acheté 100 000 € aux ventes de yearlings Arqana en octobre 2016, où il était présenté par le Haras du Mézeray, Pretreville est issu d’un famille qui a bien réussi aux États-Unis mais il faut remonter sous la troisième mère pour trouver des gagnants et placés de Groupe.

La prochaine étape de cette filière des milers de 4ans et plus est le Prix du Muguet (Gr2), programmé le 28 juin (au lieu du 1er mai, comme son nom l’indique traditionnellement).
 

Historique

En 2013, le Prix du Chemin de Fer du Nord perd son nom d’origine pour honorer celui du dernier président de la Société d’Encouragement, Bertrand du Breuil.

C’est le 13 mai 1852 que s’est déroulée pour la première fois à Chantilly une course, sur 1 200 mètres pour 2ans et au-dessus, portant cette appellation. Sa dotation, 1 000 F, était offerte par la Compagnie du Chemin de Fer du Nord, celle-là même dont les trains menaient à l’époque les turfistes de Paris à l’hippodrome de Chantilly. Les trois années suivantes, tout en ayant la même marraine, le prix, élevé à 1 500 F, supporta une course de haies sur 2 400 mètres, toujours disputée sur l’hippodrome des Condés. En 1856, retour au plat avec une course pour 3 ans et plus sur 3 200 mètres. Porté à 2 000 F en 1870 et à 5 000 F en 1906, le prix demeura offert en totalité par la Compagnie du Chemin de Fer du Nord jusqu’en 1910. En 1911, l’allocation est portée à 8 000 F dont 5 000 F offerts par la Compagnie du Chemin de Fer du Nord, le solde étant à la charge de la Société d’Encouragement. Nouvelle augmentation en 1922 : 50 000 F, dont 20 000 F offerts par la Compagnie du Chemin de Fer du Nord. Cette allocation sera la même jusqu’en 1937. Après quoi, la Compagnie du Chemin de Fer du Nord retire son parrainage à la suite de sa nationalisation au sein de la S.N.C.F. Toutefois l’appellation de la course demeura inchangée.

L’épreuve, qui s’est disputée sur différentes distances, a vu son orientation modifiée en 1933. Raccourcie à 1 400 mètres, son destin n’était plus de tester la tenue des participants, mais désormais leur vitesse. C’est toujours le cas aujourd’hui, étant demeurés faibles les écarts de distance constatés de 1 400 à 1 700 mètres, pour finalement se stabiliser à 1 600 m. en 1972.

A l’origine ouvert aux 3 ans et à leurs aînés, le Prix du Chemin de Fer du Nord est réservé aux chevaux d’âge depuis 1967. Il a abandonné Chantilly durant quelques années : pour Longchamp en 1941 et 1942 et de 1945 à 1954 ; pour Maisons-Laffitte, en 1943, 1997 et 1998. Il n’a pas été couru en 1940 et 1944 du fait de la guerre.

En 2020, la course a été déplacée de son cadre habituel, la réunion du Prix de Diane Longines, mi-juin, au mois de mai en raison de la réorganisation du programme dûe à l'épidémie de coronavirus. Elle s'est ainsi retrouvée en point de départ de la filière menant au Prix d'Ispahan (Gr1), qui se déroule en temps normal avant lui.


Bertrand du Breuil (1926-2011)

Il fut l’une des personnalités les plus marquantes du monde hippique de la fin du XXe siècle. Réuni le 22 mars 1991 pour désigner un nouveau président successeur de Gérald de Geoffre – qui refuse un nouveau mandat –, le Comité de la Société d’Encouragement choisit Bertrand du Breuil ; qui recueille 19 voix contre 14 à Paul de Moussac.

Âgé de soixante-quatre ans, Bertrand du Breuil se dévoue depuis vingt ans au service de la Société d’Encouragement dont il est membre du Comité depuis 1972 et commissaire depuis 1974. Après une carrière d’officier de cavalerie marquée par près de 150 victoires dans des épreuves internationales de saut d’obstacles, Bertrand du Breuil quitte l’armée en 1956 pour occuper différents postes de hautes responsabilités dans les sociétés papetières du groupe Béghin-Say présidé par son beau-père Ferdinand Béghin. Pour présenter l’homme nul ne peut mieux le faire qu’un écrivain, son beau-frère Jean d’Ormesson, de l’Académie française, qui le décrit ainsi dans la préface du livre « Album de Famille ».

« Bertrand du Breuil est estimé et aimé de ses amis, ce qui est la moindre des choses. Il est aussi estimé et aimé des siens et de sa famille, ce qui est beaucoup plus rare. Il a surtout des talents et des dons, ce qui est exceptionnel. Il est un des premiers cavaliers de France et rien de ce qui touche au cheval ne lui est étranger. Il a représenté notre pays dans d’innombrables compétitions internationales et il l’a souvent fait triompher sur les obstacles les plus ardus et les marches les plus hautes. Il ne s’occupe pas seulement du monde du cheval, il ne l’aime pas seulement, il n’en parle pas seulement : il sait aussi le faire revivre par le crayon et par la plume. Ce champion international est un caricaturiste hors pair. »

En effet cet assidu des réunions du Comité n’y tend pas seulement l’oreille. Son regard perçant guide aussi le tracé d’un crayon sur des petits papiers – ou le bord d’un programme – qui, réunis, constituent plus que l’album de la Société d’Encouragement, celui du turf. Ces dessins, ils font aussi sourire les lecteurs de la revue Courses & Élevage, et du livre « Album de Famille » publié en 1985 avec des textes de Natalie Carter.

Le mandat de président de Bertrand du Breuil va être le plus court de l’histoire de la Société d’Encouragement. Il ne préside que cinq séances du Comité – du 29 avril au 15 novembre 1991. Les événements vont se précipiter, devant lesquels il témoigne d’une qualité devenue rare, la bonne volonté. La situation du « galop » est mal en point quand il reçoit les commandes de la Société d’Encouragement.

Résumé de l’état des lieux. Préconisée en 1989 par Olivier Lecerf (alors président de la Fédération nationale), la société unique du galop se heurte à maints obstacles alors que la situation financière est grave. Pourtant le 4 mai 1990, est constituée l’UPG (Union Pour le Galop) regroupant les quatre sociétés parisiennes : les deux sociétés mères (Société d’Encouragement et Société des Steeples) et les deux sociétés filles (Société Sportive d’Encouragement et Société de Sport de France), farouchement indépendantes et opposées à l’union. Un des objets est la diminution des coûts de fonctionnement du galop dans la région parisienne. Bernard Le Gentil est élu président de l’UPG. En octobre, dans de nouveaux locaux communs à Boulogne, installation des services administratifs de la Société d’Encouragement et de la Société des Steeple. 8 juin 1991 à Évry, grève des partants dans la course support de paris de combinaison que les commissaires sont contraints d’annuler. « Pour qu’une seule fois, le seul gagnant aux courses (l’État) sache qu’il peut perdre » tel est l’argument avancé par les présidents des syndicats des éleveurs et des entraîneurs ayant persuadé les propriétaires de renoncer à courir leurs chevaux pourtant déclarés partants. La raison ? L’État prétend faire main basse sur la cagnotte des paris impayés. Conséquence : l’UPG est chargée de proposer les bases d’une nouvelle structure pour le galop – dont « l’union » ne se réalisera que le 3 mai 1995 avec la naissance de France Galop.

Après la grève d’Évry, contestée par de nombreux professionnels criant « Arrêtez le massacre », le président du Breuil réunit le 2 juillet 1991 le Comité de la Société d’Encouragement. Réunion cruciale qui permet de dénouer la situation très embrouillée, mais non sans déchirures. Après de nombreuses interventions dont celle de François Clos, chef du Service des Haras nationaux, se dégage la voie « du rapprochement intime et équilibré des deux sociétés mères en une seule », voie préférée depuis longtemps par le président. Après avoir reçu l’accord de la Société des Steeples et, le 9 octobre, l’aval de son Comité, le président du Breuil le réunit une dernière fois le 15 novembre 1991 afin, dans l’intérêt général, de lui faire accepter la dissolution de la Société d’Encouragement, et ce, cent-cinquante-huit ans après la première réunion du Comité le 11 novembre 1833 présidé par Henry Seymour.

Propos extraits de la déclaration du président du Breuil. « Nous devons démontrer que nous sommes capables de prendre en main nous-mêmes les destinées du galop et que nous ne voulons pas nous en remettre aux pouvoirs publics pour décider de notre sort. Il serait de plus surprenant, pour tous ceux qui nous observent, que notre réponse soit aujourd’hui négative alors que les membres du Comité se sont publiquement, comme en privé, déclarés partisans de la fusion des deux sociétés mères. […] Mais ce que vous savez peut-être moins, car pour s’en rendre compte il faut vivre quotidiennement à l’intérieur des services de notre société, c’est l’étonnement et la réprobation de tout le personnel, dont je salue à nouveau ici le dévouement et la qualité professionnelle, qui constate nos hésitations, nos tergiversations et jusqu’alors notre inaptitude à définir ensemble une politique de solidarité et de cohérence. On peut comprendre les sentiments et les inquiétudes des membres du personnel. J’ajoute qu’ils ont su, eux, depuis plus d’un an déjà, mettre en commun avec ceux de la Société des Steeple-chases leur compétence et leurs capacités pour le bien général. Il est temps en effet, que cessent nos désaccords, nos querelles, nos arrière-pensées, alors que la situation économique et financière de la filière du galop mériterait une attitude plus constructive et un comportement plus responsable. C’est ce qui nous est proposé justement aujourd’hui et nous espérons que chacun d’entre nous, comprenant l’enjeu de ce scrutin, accomplisse, dans le secret de l’isoloir, l’acte positif qui permettra d’assurer un meilleur avenir pour le galop. »

Après des exhortations à un vote positif émises successivement par Bertrand Bélinguier, vice-président, par Gérald de Geoffre, président d’Honneur, et par Bernard Le Quellec, président de la Fédération nationale, le président Bertrand du Breuil demande aux trente-deux membres du Comité présents de se prononcer à bulletin secret sur la motion suivante : « la dissolution de la Société d’Encouragement et la création de la Société d’Encouragement et des Steeple-chases de France prendront effet à compter du 1er janvier 1992 », motion qui recueille 25 voix en sa faveur et 7 oppositions.

Pour conserver le souvenir de ces heures difficiles ainsi que celui de la vie antérieure de la société mère du galop, Bertrand du Breuil avait demandé à Guy Thibault de rédiger un livre intitulé « Les heures mouvementées de la Société d’Encouragement » dont il avait rédigé la préface et qui fut publié en août 1993.

 

Propriétaires

  • Khalid Abdullah (4 victoires) : Cacique (2005), Apsis (2006), Byword (2011) et Mainsail (2013).
  • Paul de Moussac (3 victoires) : Pampabird (1983), Mill Native (1988) et French Stress (1989).
  • Guy de Rothschild (3 victoires) : Rina (1960), Cassis (1962) pour Monsieur, Hodell (1963) pour Madame.


Entraîneurs

  • André Fabre (7 victoires) : Mill Native (1988), French Stress (1989), Kingsalsa (2000), Cacique (2005), Apsis (2006), Byword (2011), Fintry (2015).
  • Alexandre Lieux (3 victoires) : Fine Art (1943), Fine Top (1954), Renard (1957).
  • Geoffroy Watson (3 victoires) : Rina (1960), Cassis (1962), Hodell (1963).
  • Christiane Head-Maarek  (3 victoires) : Pluralisme (1984), Pink (1985), Fuissé (2010).
  • Pascal Bary (4 victoires) : Field of Hope (1999), Domedriver (2002), Mainsail (2013), Pretreville (2020).
  • Jean-Marie Béguigné (3 victoires) : My Risk (2004), Spirito del Vento (2007, 2008).
  • Elie Lellouche (3 victoires) : As Que To (1992), Africanus (1993), Pinturicchio (2014).


Jockeys

  • Freddy Head (7 victoires) : Apataki (1966), Regent Street (1969), My Friend Paul (1973), Rostov (1980), Big John (1982), Pluralisme (1984), Pink (1985).
  • Cash Asmussen (4 victoires) : Mill Native (1988), French Stress (1989), Goofalik (1991), Kaldounevees (1995).
  • Christophe Soumillon (4 victoires) : My Risk (2004), Cacique (2005), Apsis (2006), Mainsail (2013).
  • William Johnstone (3 victoires) : Le Cyclone II (1936), République (1937), Eppi d’Or VIII (1950).
  • Jean-Pierre Boullenger (3 victoires) : Rina (1960), Galant Gaditan (1961), Cassis (1962).
  • William-B. Pyers (3 victoires) : Village Square (1967), Ace of Aces (1974), Full of Hope (1976).
  • Gérald Mossé (3 victoires) : Mister Sicy (1990), Jim and Tonic (1998), Beacon Lodge (2009).